Le vitrail contemporain
Architecture et matériaux, des atouts pour les vitraux
Le XXe siècle avec sa révolution architecturale, tant pour les méthodes que pour les matériaux, offre de nouvelles perspectives aux verriers. Les structures métalliques, le béton armé et les autres matériaux de construction donnent aux fenêtres une fonction nouvelle.
Le vitrail contemporain se déploie tant dans des édifices anciens que dans des constructions nouvelles. Des grands artistes s'y consacrent. Ils jouissent d'une grande marge de manoeuvre créative. Si l'architecture évolue, l'Eglise aussi se transforme. En France, elle fait appel à des plasticiens et des peintres renommés pour créer des vitraux. La disponibilité d'une large palette de verres avec d'innombrables nuances et textures, permet aux créateurs d'imaginer de nouveaux vitraux. Le verre se charge de faire communiquer l'intérieur avec l'extérieur de l'édifice. En fonction des lieux et de l'ambiance souhaitée, le maître-verrier utilise alors des verres différents.
Vitrail de Saint-Blaise réalisé par l'atelier Lesquibe. L'utilisation de dalles de verre de différentes couleurs apporte du nouveau dans la création de vitraux.
La reconstruction des édifices religieux
Les dégâts causés aux vitraux et aux édifices religieux durant les deux conflits mondiaux ont généré des constructions nouvelles. Le vitrail contemporain s'est alors installé à côté de vitraux anciens, ou encore, a investi la totalité des lieux.
La création de vitraux laïques
Le vitrail s'est aussi installé dans le domaine laïque en gagnant par exemple les intérieurs des cafés, hôtels et restaurants, mais aussi les gares, les sièges d'entreprise, les galeries couvertes (passages), les magasins, musées, universités...
Quelques grands noms liés au vitrail contemporain
Extraits de Arts et Lumière - Le vitrail contemporain
Xavier Barral i Altet - Editions de la Martinière
Le style du peintre Marc Chagall (1887-1985) qui compte de nombreux vitraux à son actif, rend ses oeuvres parfaitement identifiables. Lorsqu'il travaille le verre, il recherche la même luminosité que dans ses peintures ; le plomb lui permet d'imprimer davantage de mouvement à ses représentations.
Pierre Soulages (1919) est l'une des principales figures de l'école de Paris. Il accorde un soin tout particulier au traitement de la lumière. La couleur prédominante de ses oeuvres est le noir, associé à des teintes sombres, et parfois aussi à de petites zones sans peinture.
La transposition de la géométrie personnelle d'Aurélie Nemours (1910-2005) dans le domaine du vitrail est remarquable par l'apparente austérité des rythmes, orchestrée au millimètre près, des structures du silence et de la poésie picturale imprimant à ces oeuvres une étrange sensualité.
Alfred Manessier (1911-1993) est le premier à exécuter de façon massive des vitraux non figuratifs pour un lieu de culte, la chapelle de Bréseux en Franche-Comté. Ses vitraux se caractérisent par de gros traits noirs sur des fonds aux couleurs intenses.
Claude Viallat réalise en 1994 des vitraux pour la cathédrale de Nevers. Les taches rouges sur fond bleu sont déjà un classique du vitrail contemporain, à cause du rapport établi entre couleur et symbolisme spirituel. "Pour la cathédrale de Nevers la fenêtre axiale est dédiée à la Vierge, d'où la présence du cercle rouge"
Henri Matisse (1869-1954) affirmait que le meilleur moment pour contempler des vitraux était onze heure du matin, l'hiver. La maquette de la chapelle de Vence représente l'arbre de vie, en jouant avec le jaune translucide, le bleu marine et le vert bouteille transparent.
La cathédrale de Nevers
1 000 m2 de vitraux contemporains
La cathédrale de Nevers contient 1052 m2 de vitraux. La cathédrale intègre les vitraux de cinq créateurs contemporains : Gottfried Honegger, François Rouan, Claude Viallat, Jean-Michel Alberola et Raoul Ubac.
Les courbes géométriques de l'artiste conceptuel Honegger emplissent la cathédrale de nuances pourpres. Avec ses verrières en morceaux de verres coloré, Rouan est considéré comme un héritier de Matisse. Les vitraux réalisés pour Nevers renouvellent l'idée du collage. Les baies du coeur sont l'oeuvre de Viallat, fondateur du mouvement Support/Surfaces.
En 1992, Alberola créé ses premières oeuvres pour le transept roman sur le thème de l'Apocalypse en treize vitraux. Plus tard, on lui passe commande de vitraux pour le déambulatoire englobant la représentation d'épisodes tirés aussi bien de la Bible que des textes apocryphes.
L'église Notre-Dame au Cierge à Epinal (Vosges)
Une verrière de 180 m2
La verrière de l'église Notre-Dame au Cierge se compose du plus grand vitrail figuratif en un seul tenant, présent en France. Le vitrail réalisé en dalles de verre décrit la vie de la Vierge en dix-sept scènes. C'est une oeuvre du maître verrier Gabriel Loire (1904-1996). L'édifice religieux est envahi par les couleurs des vitraux qui complètent la grande verrière, tant à l'opposé (côté tribune et orgue) que sur les côtés de l'église.
La basilique Notre-Dame d'Espérance à Charleville-Mézières
68 verrières du même auteur : René Dürrbach
Les 68 verrières de la basilique Notre-Dame de l'Espérance à Mézières ont été créées par la même personne et durant 25 années de sa vie (1954-1979). La surface des vitraux de René Dürrbach (1911-1999) atteint 1000 m2 dans cet édifice de l'est de la France. Ami de Pablo Picasso, le peintre et sculpteur René Dürrbach déploie son propre style dans l'ensemble de la basilique, ce qui apporte à la fois une unité et une force. Il s'émancipe du cubisme pour parvenir à un mode d'expression qui lui est propre. Chaque thématique est traduite par des choix plastiques : composition générale, couleurs, symboles. Il conçoit une symbolique qu'il veut à la fois profondément chrétienne et universaliste.
Vitrail de la ressurrection
Eglise de Bennwihr (Alsace)
Conçu par le peintre-verrier Paul Martineau en collaboration avec les "Artisans du sanctuaire de Paris", le vitrail de l'église de Bennwihr inonde de lumières l'intérieur de l'édifice. Le vitrail a été réalisé aux usines Saint-Gobain.
Les vitraux de Jean Cocteau
Eglise Saint-Maximin à Metz
Jean Cocteau est un poète français, un artiste aux multiples talents. En 1961, il se voit confier l'étude des vitraux destinés à garnir les baies du choeur de l'église Saint-Maximin à Metz. Jean Cocteau a dessiné les vitraux, alors que la réalisation et la pose des vitraux du choeur, en 1964, ont été confiées à l'atelier Brière de Levallois-Perret. A la mort de Jean Cocteau (1963), les dessins de quinze autres vitraux destinés à cette église ont été révélés, ce qui a permis de compléter le chantier, à l'exception de quelques baies, car Jean Cocteau n'a malheureusement pas eu le temps de tous les dessiner.
Le résultat est une oeuvre originale : "la lumière fait surgir l'invisible".
Chapelle de l'établissement Saint-Joseph à Reims
20 verrières d'un même artiste
Oeuvre de Jean-Paul Agosti, ces vitraux de la Chapelle de l'établissement scolaire Saint-Joseph à Reims ont été réalisés grâce à des fonds privés (1500 donateurs). Les 20 verrières représentent une surface de 300 m2. La technique employée fait appel au sablage d'une pellicule colorée présente sur le verre et à l'ajout d'émaux. La réalisation des 3225 plaques a été confiée à l'atelier Simon-Marq de Reims. L'artiste Jean-Paul Agosti a choisi des couleurs à tendance jaune pour les vitraux disposés au sud et des couleurs à tendance bleue et verte pour ceux exposés au nord. Les quatre vitraux du coeur (représentants les évangélistes) sont de tendance rouge. La verrière ci-contre, située au fond de la chapelle, est un arbre de vie dans un tourbillon - un lien avec l'enseignement dispensé dans l'établissement où se trouve la Chapelle.
Comme le montre les photos, l'ensemble forme une belle unité dans cet édifice néogothique de 1874.
Eglise de la Bresse (Vosges)
Des vitraux en verre éclaté
Au fond de l'église de la Bresse dans les Vosges, quatre vitraux rappellent les destructions du village et de son édifice religieux.
-En 1466, par un parti de soudards de la vallée de Munster.
-En 1642, par les Suédois, alliés de Richelieu
-En 1803, l'église est incendiée en même temps que 20 immeubles du village
-En 1944, par les Allemands en déroute.
Les vitraux, en verre éclaté, ont été exécutés par le Maître Verrier Gabriel Loire de Chartres. Dans la nef, douze vitraux ont été réalisés sur le thème du Crédo.
Dans le coeur, trois vitraux illustrent respectivement, le Christ en croix, l'Assomption de la Vierge Marie et Saint-Laurent.
Eglise Saint-Rémy de Baccarat
Des vitraux en cristal
L'Eglise Saint-Remy de Baccarat a été érigée entre 1953 et 1957 sur les ruines de l'ancienne église, détruite en octobre 1944 par un bombardement allié, Saint-Remy est toute entière placée sous le signe du triangle, symbole de la Sainte-Trinité.
A l'intérieur, la décoration en dalles de Baccarat est composée de 20 000 pièces de cristal ajustées dans le béton. L'ensemble, unique au monde, se décline en plus de 150 teintes différentes. Le thème général est "La Vie et la Lumière".
La cathédrale Saint-Dié (Vosges)
300 m2 de vitraux contemporains
La cathédrale Saint-Dié, située à Saint-Dié dans les Vosges, est un édifice catholique romain. Avec l'église Notre-Dame de Galilée et le cloître qui relie cette église à la cathédrale, l'ensemble forme un espace architectural remarquable, unifié par l'emploi du grès rose des Vosges.
En 1944, la cathédrale a été en grande partie détruite, et seuls huit vitraux, des médaillons du XIIIème siècle, ont été sauvés. Dans les années 1980, l'artiste Jean Bazaine a présenté un projet pour refaire 53 baies, représentant 300 m². Les oeuvres non-figuratives furent confiées à la compétence de 10 peintres sur le thème Mort et Résurrection.
Les derniers vitraux ont été posés en 1987.
Centre Pompidou - Metz (Moselle)
Chagall, le passeur de lumière
L'exposition Chagall qui a fermé ses portes le 31 août 2021 au centre Pompidou de Metz s'intitulait : Chagall, le passeur de lumière. L'exposition retraçait l'histoire et les enjeux de chacune des commandes faites à l'auteur entre 1956 et 1984. Les vitraux de Marc Chagall, mis en correspondance avec l'oeuvre peint et sculpté, révèlent un langage personnel qui associe avec ingéniosité les diverses cultures visuelles et mentales façonnant son imaginaire. Les multiples esquisses qui préparent l'oeuvre de verre mettent en évidence le processus de création de vitraux. De l'esquisse au vitrail - ci-dessous : la Chapelle du Saillant et la Cathédrale de Metz.